Si la mise en œuvre d’une pédagogie participative et sociale repose sur une réflexion théorique préalable, elle nécessite ensuite de prendre le temps de tester différentes possibilités et d’adapter progressivement son enseignement à ce qui peut constituer une véritable rupture pour les enseignants, mais aussi pour les élèves ! Imposer un tel changement de façon trop radicale et sans explication risquerait de vite devenir contreproductif.
De plus, le cours dialogué et le cours magistral n’en deviennent pas automatiquement obsolètes. Ils demeurent très utiles dans l’apprentissage de la prise de notes et la préparation de certaines formations de l’enseignement supérieur.
Enfin, il convient de veiller à ne pas remplacer une routine par une autre. L’un des intérêts de la classe inversée repose sur la possibilité de dégager du temps pour mener de nouveaux projets pédagogiques. Passé l’effet de surprise, les élèves risquent vite de se lasser s’il ne s’agit finalement que de remplacer le cours dialogué par des travaux de groupes routiniers.
Les exemples développés ci-dessous ont pour objectif de fournir des sources d’inspiration visant à nourrir désormais concrètement la réflexion.
Sur son site Internet, Jacques NIMIER raconte comment il a mis en œuvre les principes fondamentaux de la classe inversée dans les années 1970, lorsqu’il n’était pas encore question d’imaginer l’apparition et la démocratisation des ordinateurs personnels, de l’Internet, des réseaux sociaux et des applications mobiles :
« Au début de l’heure (ou des deux heures en Terminale) je commençais par la présentation d’un chapitre du livre que les élèves auraient à étudier chez eux; je signalais les paragraphes importants et à travailler, ceux à simplement lire et ceux qu’on pouvait sauter. […]
Puis j’indiquais sur le livre les exercices ou travaux qu’il pourrait être intéressant de faire et je demandais alors aux élèves de travailler ces exercices en groupe.
Pour cela, la classe était répartie en groupes de 3 ou 4 élèves (deux tables inversées et l’une contre l’autre) les élèves se faisant face.
Dans un premier temps les élèves se mettaient à travailler en groupe; ils partageaient les difficultés rencontrées dans l’étude du chapitre chez eux; certains expliquaient à ceux qui n’avaient pas compris ; si tout le groupe butait sur une même difficulté il pouvait m’appeler. J’allais dans ce groupe expliquer ce point.
Dans un deuxième temps les élèves d’un même groupe choisissaient un exercice dans leur livre, sur des feuilles d’exercices distribuées ou dans d’autres livres (bibliothèque en classe constituée des spécimens reçus), puis le travaillaient, en général en deux périodes, une phase individuelle suivie d’une mise en commun dans le groupe ou certains élèves expliquaient à d’autres ce qu’ils avaient fait ou trouvé. Ils avaient la possibilité (en levant la main !) de m’appeler pour les dépanner.
Je pouvais donc durant l’heure de cours, soit répondre aux demandes des groupes qui m’appelaient ou travailler avec un élève qui avait des difficultés importantes.
Il arrivait qu’en circulant au milieu des groupes je constatais que beaucoup d’élèves avaient une même difficulté. Alors je demandais à la classe de faire silence quelques instants et j’exposais cette difficulté et en proposais une solution au tableau pour tous et les groupes reprenaient ensuite leur travail. »
Cet exemple peut constituer un point de départ nécessitant peu d’investissement en temps et en préparation pour tester la pratique de la classe inversée.