Archives mensuelles : juillet 2014

L’utilisation du QCM est-elle un problème ?

Beaucoup d’enseignants français sont encore opposés à l’utilisation du QCM considéré comme contradictoire avec les attentes du système éducatif. On estime en effet que l’une des priorités de l’école française consiste à entraîner nos élèves à lire et écrire pour être ensuite eux-mêmes en mesure de développer un raisonnement construit, ce que les cases à cocher ne permettraient pas. Rien n’est moins sûr à partir du moment où l’on commence à réfléchir sur cet outil afin de l’utiliser à bon escient.

La présentation ci-dessous de Marcel Lebrun et Gwénaëlle Le Mauff fournit quelques éléments de réflexion dont nous proposons une synthèse et des adaptations dans le cadre de la pédagogie participative et sociale :

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Quels sont les avantages ?

  • L’objectivité : la pratique du QCM supprime les biais de l’évaluation.
  • La rapidité : certains outils disponibles sur Internet permettent désormais de créer gratuitement un QCM en seulement quelques minutes et de corriger des questionnaires en temps réel. Le gain de temps pour l’enseignant se chiffre en centaines d’heures par année.
  • Le diagnostic : certains outils d’évaluation par QCM permettent désormais aux correcteurs de recevoir des statistiques de réussite de ses élèves par question. Il devient dès lors possible de cibler rapidement les points nécessitant une remédiation.
  • La diversité des QCM : chaque exercice permettant d’évaluer une compétence particulière (vrai ou faux, questionnaire à choix unique, questionnaire à choix multiple, questionnaire processus, questionnaire à appariements, questionnaire d’ordonnancement, phrases à compléter etc.)

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Quels sont les inconvénients ?

  • Le risque de fraude : bien que la plupart des outils disponibles propose un classement aléatoire des réponses, voire des questions, il est difficile d’empêcher les élèves d’avoir parfois le regard porté sur l’écran du voisin.
  • La tentation du détail : au moment de la réalisation des QCM, l’enseignant peut être tenté de poser les questions sur des éléments précis de la leçon (date, formule, etc.) plutôt que de valider la compréhension globale du cours.
  • Le hasard : lorsque quatre solutions possibles sont proposées, il peut arriver qu’un élève ait parfois de la chance et réponde correctement par hasard. Un nombre suffisant de questions (au minimum 10) permet d’éviter cet écueil.
  • Les limites intrinsèques de l’outil : le QCM permet d’évaluer l’acquisition de connaissances, la compréhension d’une leçon, l’analyse d’un document, voire l’ordonnancement d’idées, mais il ne permet pas d’évaluer la rédaction, l’esprit de synthèse, l’invention de solutions nouvelles, etc. C’est un outil parmi d’autres.

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Quelle utilisation dans le cadre de la pédagogie participative et sociale ?

  • Règle n° 1 : Le QCM ne saurait être un mode d’évaluation exclusif. Il peut cependant s’intégrer en complément d’autres modes d’évaluation écrits et oraux. Les QCM peuvent en revanche être autant utilisés dans le cadre d’une évaluation diagnostique, formative, ou bien sommative.
  • Règle n° 2 : La consigne de l’exercice d’être claire (type d’exercice, choix unique ou multiple, etc.) et le barème doit être indiqué (pénalité en cas d’absence de réponse ou bien de réponse fausse ?).
  • Règle n° 3 : Il est possible de proposer aux élèves des QCM de préparation permettant de les accompagner dans leurs révisions en fléchant les éléments essentiels à retenir. Assez rapidement, les élèves peuvent aussi proposer leur propre QCM de révision à mutualiser avec l’ensemble de la classe.

En somme, l’utilisation du QCM ne vise pas seulement à évaluer l’élève, mais aussi à l’accompagner dans son apprentissage, à le rassurer en lui proposant des outils d’entraînement,  et à l’encourager à travailler en équipe en mutualisant les outils de révision.

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Des propositions d’outils

  1. EvalQCM : facile à utiliser, il vous permet d’inscrire en quelques minutes vos élèves par classe. Ces derniers se verront alors attribuér des QCM pour un temps d’évaluation bien défini. À l’issue de l’évaluation, ils reçoivent directement leur note et peuvent consulter la correction. L’enseignant reçoit de son côté un fichier Excel avec les notes de ses élèves et les statistiques de réussite à chaque question. Hélas, il n’est pas possible de stocker plus de 20 QCM en ligne et les types d’exercices sont assez limités.
  2. Claroline : permet de dépasser les limites du précédent outil, mais nécessite un téléchargement qui n’est pas toujours possible dans les établissements.
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Organiser et diffuser des informations à destination des élèves

Cet article s’adresse à des enseignants qui pratiquent régulièrement la « classe inversée ». Il a pour objectif de faire un bilan des outils permettant de faciliter la mise en œuvre quotidienne de cette pratique pédagogique.

Lorsqu’on commence à systématiser cette méthode de travail, il devient en effet nécessaire de s’organiser pour diffuser régulièrement et facilement des informations à destination des élèves. Plusieurs solutions sont alors envisageables.

Les paragraphes ci-dessous ont pour ambition de proposer une liste exhaustive afin de vous permettre de faire les choix qui vous conviennent. Il ne m’a cependant pas été possible de tester tous ces outils ; c’est pourquoi les commentaires et les messages sont les bienvenus afin de compléter progressivement cet article à partir de vos expériences et d’éventuels didacticiels.

Enfin, vous vous apercevrez vite en parcourant cette liste de l’urgence pour l’Education nationale à réagir et à investir massivement afin de proposer rapidement à ces enseignants des outils qui restent hélas pour le moment majoritairement développés par le secteur privé qui ne propose souvent que les versions limitées ou démonstratives.

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1. Créer un blog ou un site Internet

La création d’un blog ou d’un site Internet peut paraître fastidieuse au départ, mais s’avère très rentable sur le long terme :

  • Il vous permet d’abord d’organiser les ressources que vous mettez à la disposition de vos élèves dans des catégories bien précises (par classe, par chapitre, par compétence…). Très rapidement, vos élèves sauront où aller chercher les informations dont ils ont besoin. Les élèves qui souhaitent s’avancer sur leur travail peuvent d’ailleurs anticiper certaines activités, et ceux qui souhaitent revenir sur certains chapitres dans le cadre de leurs révisions pourront également le faire.
  • Il vous permet ensuite de gagner beaucoup de temps. D’une année sur l’autre, il ne vous sera en effet pas nécessaire de recommencer la publication de toutes vos ressources. En revanche il vous sera possible de les modifier, de les réorganiser, ou bien de les compléter.

Plusieurs outils sont disponibles sur Internet pour créer rapidement un blog ou un site. La liste ci-dessous recense les principales solutions existantes avec les informations de base vous permettant de faire le meilleur choix pour votre projet :

  1. WordPress est actuellement l’une des plates-formes de création de blogs et de sites Internet les plus complètes. C’est celle que j’utilise à titre personnel pour mon blog de la classe (Historicophiles) mais aussi pour le blog que vous êtes en train de lire. Son principal avantage repose sur les multiples possibilités d’intégration qu’il permet directement dans vos articles (images, vidéos YouTube, Google formulaire, etc.) et sur la facilité d’organisation les différentes catégories. Son principal inconvénient reste néanmoins la présence de publicité dans la version gratuite.
  2. Overblog est une plate-forme similaire permettant de créer un blog tout aussi facilement et rapidement. Il a l’avantage de ne pas publier de publicité sur vos pages si vous écrivez un article au moins tous les 45 jours. En revanche, il offre beaucoup moins de possibilités de développement que WordPress.
  3. LeWebPedagogique propose également d’héberger rapidement et simplement des blogs à vocation pédagogique.
  4. Blogger est l’outil indispensable pour les inconditionnels de l’univers Google.
  5. Weebly est l’un des outils les plus récents proposer sur la toile. Son utilisation est particulièrement intuitive.

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2. Les supports de management de contenus d’enseignement 

Face au succès des sites et blogs de classe, de nombreux éditeurs de logiciels se sont lancés à l’assaut de ce nouveau marché en expansion. Depuis quelques mois, de nouveaux outils appelés les « Learning Management System » (LMS) ou »Learning Support System » (LSS) ont donc fait leur apparition.

La meilleure façon d’expliquer le fonctionnement de ces outils est aujourd’hui de faire référence à la Khan Academy. Ces plates-formes vous permettent de créer relativement facilement des modules de formation sur le modèle de ceux proposés par cette institution : c’est-à-dire en fournissant non seulement des supports de cours (sous format texte, vidéo ou animation), mais aussi des fonctionnalités permettant d’évaluer à différentes étapes la progression des élèves (quiz, tests, etc.) et de vérifier à tout moment leur cheminement (grâce à des statistiques d’avancement dans les apprentissages).

Certains de ces outils sont vraiment très convaincants et permettent de mettre en œuvre une véritable progression pédagogique en ajoutant au fur et à mesure différentes ressources : textes, images, vidéos, exerciseurs, etc.

Pour ma part, je ne les utilise pas encore pour différentes raisons :

  • D’abord, pour une question de droit : utiliser de tels outils nécessite de demander aux élèves de s’inscrire sur une plate-forme numérique dont nous ne connaissons pas toujours le propriétaire, la localisation et la politique en termes de gestion des données personnelles. C’est pourquoi il serait urgent l’Education nationale propose rapidement un outil validé officiellement pour le mettre à disposition de ses enseignants.
  • Ensuite, pour une question pratique et de philosophie éducative : utiliser de tels outils nécessite que les élèves s’inscrivent puis se connectent pour accéder uniquement aux ressources et aux activités proposées par leur professeur. Il s’agit donc d’un système fermé alors que l’un des objectifs de la pédagogie participative et sociale (PEPS) repose au contraire sur des principes d’ouverture, de partage et de mutualisation.

Ces outils peuvent néanmoins être utilisés ponctuellement pour proposer aux élèves une progression en autonomie sur plusieurs séances (par exemple lorsque l’enseignant doit s’absenter pour accompagner un voyage scolaire).

La liste ci-dessous recense les principaux outils existants :

  • Didacti est celui qui me semble être le plus simple d’utilisation et le plus adapté à l’enseignement secondaire.

Actualisation du 24 août 2014 : depuis le 18 août 2014, Didacti est devenu ChallengeU. 

  • Moddle est l’outil le plus ancien dans ce domaine. D’abord développé pour l’enseignement supérieur, il évolue sans cesse pour s’adapter au marché de l’enseignement secondaire. Néanmoins, je le trouve encore un peu trop complexe. L’IUT de Toulouse propose une série de didacticiels en ligne pour apprendre à utiliser toutes les fonctionnalités de cet outil.
  • Claroline qui présente l’énorme avantage d’être gratuit

  • Face à l’émergence exponentielle de ces outils, certains éditeurs tentent de se démarquer en proposant des plates-formes permettant de transformer votre progression de cours en un jeu de rôle médiéval. C’est le cas de Classcraft dont l’idée va probablement être reprise très rapidement pour proposer d’autres jeux de rôle dans différents univers.

Pour une modernisation des ressources scolaires

L’un des principaux défis de l’enseignant qui décide de mettre en œuvre les principes de la pédagogie participative et sociale (PEPS) consiste à trouver des ressources adaptées aux élèves et aux programmes.

La solution la plus simple aujourd’hui est d’utiliser les parties « leçon » des manuels scolaires que les élèves peuvent travailler en autonomie avec l’aide de questionnaires d’accompagnement réalisés par le professeur. Cependant, ces pages ne sont pas toujours les plus satisfaisantes, ni les plus complètes. L’évolution des attentes de l’institution, des enseignants et des parents ont en effet progressivement conduit les éditeurs scolaires à minimiser les parties « leçon » au profit de multiples documents et dossiers.

Une alternative consiste à fournir aux élèves des polycopiés qui résument la partie du cours que l’on souhaite leur faire travailler en autonomie.

Ces solutions manquent cependant d’originalité et c’est pourquoi plusieurs professeurs ont récemment fait appel à la vidéo qui présente l’avantage de résumer en quelques minutes les éléments essentiels d’une leçon et qui peut être regardée sur un ordinateur en classe, sur une tablette au CDI, au fond de son lit ou bien dans les transports en commun.

Hélas, ces ressources restent encore rares ou bien inadaptées aux programmes scolaires français.

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Quels sont les besoins ?

Plusieurs exemples anglo-saxons fournissent des pistes de ce que pourraient être les ressources vidéo utilisables dans un contexte scolaire.

La série américaine Crash Course est particulièrement convaincante dans sa mise en scène et dans son découpage thématique. L’auteur utilise en effet l’humour et une dynamique soutenue pour conserver l’attention des élèves, tout en diffusant un contenu complet et structuré :

L’autre exemple désormais bien connu est celui de la Khan Academy  qui se diffuse à l’échelle internationale mais dont la version française ne propose pas pour l’instant de cours d’histoire, ni de géographie. Les ressources disponibles en anglais témoignent cependant d’un contenu efficace et d’une grande qualité reposant sur de courtes vidéos illustrées par des cartes et des documents d’archives :

L’intérêt de la Khan Academy ne se limite pas cependant à fournir des vidéos de cours. Le site Internet propose également de véritables parcours permettant de suivre une leçon complète ou bien seulement quelques séances qui sont à chaque fois associées à des activités permettant d’accompagner progressivement l’apprentissage.

C’est ce genre de ressources qui manquent aujourd’hui aux enseignants français, c’est-à-dire une banque de ressources dans laquelle ils pourraient piocher ponctuellement pour traiter certains aspects ponctuels de leurs cours.

Bien que les vidéos proposées par Pythagora et FranceTVéducation soit d’une qualité appréciable,  elles ne permettent pas pour l’instant une utilisation pédagogique en classe car elles se limitent à une approche synthétique par chapitre. Si elles sont très utiles aux élèves pour réviser à la veille d’un examen, elles ne permettent donc pas aux enseignants de recréer eux-mêmes leur propre parcours pédagogique.

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Vers un nouveau modèle économique

Les éditeurs de ressources scolaires ont bien pris conscience de l’évolution des attentes d’une partie grandissante des enseignants français qui, équipés de vidéoprojecteurs et de connexions Internet dans leurs salles de classe, utilisent de moins en moins les manuels au profit des ressources innombrables qui sont à leur disposition sur le Web. Dans de nombreux établissements, l’équipement systématique des élèves en manuels ne tient plus parfois qu’à la seule volonté des parents qui restent encore très attachés à cet objet qui a occupé une place importante dans leur propre scolarité. La réduction progressive des budgets des collectivités territoriales risque cependant de bientôt faire sauter ces derniers verrous… à moins que les éditeurs scolaires ne trouvent rapidement des solutions pour renouveler leur offre !

En face, d’autres acteurs se préparent en effet à attaquer le monopole des éditeurs scolaires. Il suffit pour s’en rendre compte d’observer le nombre de sites et d’applications mobiles qui ont été proposés gratuitement ou à des prix modiques aux élèves préparant un examen en 2014. Si certains relèvent de l’escroquerie, d’autres ont créé des contenus d’une grande qualité et continuent à recruter des enseignants pour élargir leur offre dès la prochaine rentrée.

Or, si la plupart des éditeurs scolaires sont vraisemblablement prêts à dégainer leur offre de ressources en ligne, ils n’ont pour l’instant encore rien annoncé officiellement pour la rentrée 2014. Et pour cause : le marché des manuels scolaires traditionnels reste encore confortable et les manuels numériques n’ont pas rencontré jusqu’à présent le succès escompté. Il faut dire que la mise en oeuvre de ces ressources a déçu de nombreux collègues en raison de la pauvreté initiale de l’offre (qui se contentait parfois de proposer un PDF des pages du manuel papier), de multiples difficultés techniques (notamment la complexité d’accès aux plateformes), mais aussi du coût  qui venait souvent s’ajouter à celui du manuel traditionnel (et souvent pour une durée limitée d’accès aux ressources numériques). De plus, alors que les spécimens-papier sont systématiquement envoyés dans les établissements, l’offre numérique n’a pas fait l’objet d’un véritable accompagnement permettant de convaincre les enseignants de leur utilité.

Dans le contexte budgétaire actuel, il est peu probable que des collectivités territoriales acceptent de financer les deux supports (papier et numérique). Or, à défaut d’un équipement  informatique systématique de toutes les salles de classe et des familles, les enseignants continueront encore à privilégier les versions papiers pendant quelques années, renvoyant ponctuellement leurs élèves à des ressources numériques gratuites et faisant le bonheur des  nouveaux acteurs qui se préparent depuis quelques mois à l’émergence d’une telle demande.

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Pour une modernisation des offres en ressources scolaires

A mon sens, les éditeurs scolaires qui parviendront à tirer leur épingle du jeu seront ceux qui accepteront d’adapter leur modèle économique en utilisant l’accès à des ressources numériques non pas comme une offre complémentaire, mais comme un produit d’appel associé au manuel papier. En somme, les équipes n’auraient pas à choisir entre le manuel papier et le manuel numérique, mais choisiraient leurs manuels papiers aussi en fonction de la qualité des services numériques qui lui seront associées.

De plus, il serait utile d’envisager la création de communautés d’enseignants susceptibles d’initier et de mutualiser sur la plateforme numérique de chaque manuel les activités qu’ils mettent en oeuvre dans l’utilisation quotidienne de ces ressources (à l’image de ce que propose modestement, mais avec succès, Le Livre Scolaire). Non seulement ce service permettrait d’assurer la promotion et le suivi des offres, mais il contribuerait également à la fidélisation des équipes à un produit.

En termes de contenus, il convient enfin d’insister sur l’importance aux yeux des enseignants de bénéficier d’une banque de ressources dans laquelle ils puissent piocher ponctuellement afin de recréer leur propre parcours pédagogique en fonction des choix de leur programmation, du matériel à leur disposition, du niveau de leurs élèves et de leur propre sensibilité pédagogique. Comme le rappelle très justement Bruno Devauchelle, l’enseignant est « un véritable ingénieur pédagogique » qui n’acceptera de s’emparer des ressources numériques qu’à condition « de ne pas vouloir guider constamment celui qui apprend mais simplement baliser une progression qu’une relation directe permettra éventuellement d’ajuster« .

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Espérons que les moyens annoncés récemment par le gouvernement pour le développement d’une filière industrielle française du numérique éducatif permettront de répondre à un tel défi. La très grande majorité des enseignants, des élèves et des parents sont attachés à la qualité éditoriale des manuels qui leurs sont actuellement proposés. Il serait regrettable qu’un manque de réactivité sur la forme finisse par nuire aux moyens permettant de financer le fond.

Quelques généralités avant de commencer

Les capsules vidéos constituent l’un des éléments les plus représentatifs de la pédagogie inversée, ce qui n’est pas sans susciter l’ironie de certains collègues qui considèrent un peu rapidement que le seul apport de cette pédagogie consiste à remplacer le cours donné en classe par un cours enregistré en vidéo.

L’existence d’un tel outil permet certes aux élèves de regarder un cours quand ils le veulent et autant de fois qu’ils le veulent, mais il oblige aussi le professeur à réfléchir sur la création et l’utilisation d’un nouvel outil de transmission des connaissances.

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Avant de passer en revue les outils permettant de créer de courtes vidéos de cours, il convient de rappeler quelques règles simples pour que cet outil soit utile et efficace :

Règle n° 1 : la vidéo doit être courte

Règle n° 2 : Il est préférable que le commentaire audio soit réalisé avec votre voix

Règle n° 3 : La vidéo doit suivre un plan clair et précis

Règle n° 4 : La plupart des illustrations doit avoir une valeur illustrative. Le format vidéo est peu adapté au commentaire de documents

Règle n° 5 : Le résultat final doit être dynamique

La collection des petites capsules produites en anglais par Crash Course sont à mon sens celles qui répondent le mieux à ces exigences, notamment par leur dynamisme et leur mise en scène :

 

Néanmoins, la série de vidéos produites par France TV dans le cadre de son MOOC pour les révisions du baccalauréat se défendent plutôt bien concernant la rigueur du plan :

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À défaut d’avoir les compétences techniques pour réaliser de telles vidéos, différents outils vous permettent néanmoins d’en approcher en quelques minutes :

1. Les enregistreurs d’écran

Ces outils permettent de commenter en direct vos différents supports de cours (PowerPoint, Prezi, SlideShare, etc.). Ils sont non seulement très efficaces, mais ils vous permettent également d’envisager la création de vidéos en seulement quelques minutes.

    • ShowMe (application iPad, gratuite)
    • Explain Everything (application iPad, 2,99 $)
    • Screenr (application Web, durée maximum de 5 minutes)
    • Screen-o-matic (application Web, durée maximum de 15 minutes)
    • Camstudio (logiciel libre et gratuit, Windows)
    • RecordMyDesktop (logiciel libre et gratuit pour Linux, inclus dans la distribution Ubuntu aussi)
    • VLC Media Player (logiciel libre et gratuit, Windows)
    • Camtasia (logiciel commercial Mac et PC)
    • Jing (Logiciel gratuit pour Mac et PC) : vidéos limitées à 5 minutes.

2. Les logiciels d’animation

La vidéo n’est cependant pas le seul support permettant de créer des animations. D’autres outils simples d’utilisation sont envisageables :

    • Le traditionnel PowerPoint permet de créer des présentations animées très convaincantes en seulement quelques clics.
    • Il est à noter que SlideShare propose des fonctionnalités similaires tout en permettant de stocker vos présentations sur Internet et de les rendre publiques.
    • Prezi permet de créer des présentations permettant d’intégrer des images, du son, des vidéos et des liens logiques entre tous ces éléments.
Cliquez sur l'image pour visualiser un exemple
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3. Powtoon

Une mention spéciale doit être accordée à ce logiciel en ligne qui permet de réaliser des animations très réussies en quelques minutes seulement. Au début, il est possible d’utiliser des modèles pour plus d’efficacité… mais vous aurez rapidement envie de construire vos propres animations correspondant à vos attentes et à votre personnalité.

L’exemple ci-dessous est une présentation réalisée par des élèves de Première :

Cliquez sur l'image pour accéder à la présentation
Cliquez sur l’image pour accéder à la présentation

Blackboard-BroochLorsque votre vidéo ou votre présentation est créée, plusieurs solutions s’offrent à vous pour la publier et la diffuser à vos élèves :

  1. Soit l’outil que vous avez choisi offre une solution d’hébergement interne : c’est le cas de SlideShare, Powtoon et Prezi ;
  2. Soit votre vidéo nécessite un hébergement externe : il est alors possible de la publier sur youtube, Daily Motion, Vimeo ou TeacherTube qui offrent des solutions gratuite.

Quelle place pour le travail personnel ?

La question du travail personnel a fait l’objet d’études récentes dans le cadre de la réflexion sur sa suppression à l’école primaire. En revanche, encore trop peu d’études sont consacrées à ce sujet pour l’enseignement secondaire. Deux documents nous permettent pourtant d’y réfléchir dans le cadre de la pédagogie participative et sociale :

  • L’ouvrage de Patrick Rayou : Faire ses devoirs. Enjeux cognitifs et sociaux d’une pratique ordinaire (Presses universitaires de Rennes, 2009).

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Que nous montrent ses études ?

  1. D’abord, que les élèves consacrent peu de temps au travail personnel (une heure en moyenne par jour).
  2. Ensuite, que ce travail est généralement peu rentable. En effet, il consiste pour la plupart des élèves à relire leur cours ou à essayer de l’apprendre par cœur. Rares sont ceux qui réalisent des synthèses et fiches de révision leur permettant d’accompagner le processus d’apprentissage. Quant aux exercices d’entraînement pour mettre en application les connaissances acquises durant le cours, ils sont généralement réalisés jusqu’à ce que l’élève rencontre une difficulté et décide d’attendre la correction.
  3. L’usage des réseaux sociaux et des outils numériques (pour écouter de la musique, regarder des séries, etc.) continue à gagner du terrain sur le temps de travail personnel des élèves.
  4. Enfin, le travail réalisé à la maison renforce les inégalités sociales entre les élèves dont les parents peuvent assurer un suivi et les élèves qui se retrouvent seuls le soir face à leur cahier et leurs difficultés.

Ce travail est par ailleurs souvent mal vécu par les élèves et leurs parents car il est synonyme d’angoisse lorsqu’un exercice pose des difficultés. De plus, il suscite de nombreuses frustrations lorsque le professeur consacre finalement peu de temps en classe à sa reprise ou sa correction.

Blackboard-BroochQuelles solutions envisager ?

Beaucoup de professeurs considèrent à tort que la classe inversée consiste schématiquement à externaliser l’acquisition des connaissances à la maison pour réserver le travail d’apprentissage et d’entraînement à la classe. Or, cette stratégie serait vaine si elle était mise en œuvre systématiquement. Seules quelques parties de la leçon peuvent donner lieu à une telle inversion.

L’un des objectifs de la pédagogie participative et sociale (PEPS) consiste plutôt à chercher des solutions pour rentabiliser le travail personnel sans trop l’alourdir et surtout sans mettre en difficulté les élèves qui n’ont pas forcément un adulte à leur disposition à la maison pour répondre à d’éventuelles questions.

C’est pourquoi le travail personnel dans le cadre de la PEPS ne consiste jamais à donner des ressources brutes à apprendre sans accompagnement ou des exercices d’application de la leçon. Il est plutôt préférable d’accompagner les ressources à travailler d’un questionnaire qui va permettre à l’élève d’être guidé dans son apprentissage et de l’aider à sélectionner les informations importantes à retenir.

Pour plus d’interactivité, il est par exemple possible d’accompagner une ressource vidéo d’un formulaire Google permettant au professeur de recevoir un fichier informatisé avec toutes les réponses des élèves. Ainsi, il lui est plus facile de repérer les élèves qui n’auraient pas fait leur travail et de sélectionner directement les réponses qui nécessitent une remédiation. Par ailleurs, l’usage d’un formulaire informatisé permet d’accompagner l’outil d’un lien pour solliciter l’aide de ses camarades via un forum.

Quoi qu’il en soit, il est important que tout travail personnel donne lieu à une reprise en classe afin de s’assurer que tous les élèves ont bien compris les éléments à retenir et qu’ils peuvent donc désormais se consacrer en classe à des activités complexes.

Comment donner du PEPS à son cours ?

Cet article se présente comme un mode d’emploi simplifié permettant de construire rapidement une séquence utilisant la pédagogie participative et sociale (PEPS).

Etape 1 : construire le plan de la séquence et identifier les connaissances à partir notamment des programmes et des ressources sur Eduscol.

Etape 2 : sélectionner les parties du cours qui peuvent faire l’objet d’un enseignement en autonomie

Plusieurs critères permettent de sélectionner ces parties :

  • Elles sont relativement simples et permettent aux élèves de travailler en autonomie,
  • Elles ne nécessitent pas ou peu d’analyse et consistent généralement en un simple repérage d’informations. Toute activité susceptible de mettre en difficulté l’élève doit être réservée au temps de la classe afin qu’il puisse solliciter d’autres élèves ou bien le professeur.
  • Elles sont résumées dans un document support ou une ressource que vous pouvez mettre facilement à la disposition des élèves (vidéo, dossier du manuel, résumé de cours, etc.). Si aucune ressource ne vous semble satisfaisante, il est possible de la créer vous-même (voir la rubrique « Outils & Didicticiels »).

Etape 3 : préparer un questionnaire d’accompagnement pour guider la préparation des élèves

Donner une vidéo à regarder ou texte à lire sans accompagnement s’avère généralement peu efficace car rares sont les élèves capables de sélectionner l’information essentielle d’un document. C’est pourquoi il est nécessaire des les accompagner dans cette étape.

L’utilisation d’un formulaire Google est particulièrement intéressant car il permet au professeur de recevoir automatiquement un fichier avec les réponses des élèves. Il lui est donc possible de vérifier en quelques secondes avant le cours les éventuels élèves qui n’auraient pas fait l’exercice, mais aussi de sélectionner certaines réponses susceptibles de faire l’objet d’une reprise en classe.

Non seulement le suivi du travail des élèves est beaucoup plus précis, mais il permet également d’organiser une remédiation plus efficace lorsque le professeur s’aperçoit qu’une majorité des élèves n’a pas réussi une question précise. Quoiqu’il en soit, il est important que chaque partie réalisée en autonomie par les élèves fasse l’objet d’une reprise collective en classe afin qu’ils puissent poser d’éventuelles questions.

Précisons enfin que ces travaux en autonomie ne signifient pas forcément qu’ils doivent être réalisés à la maison. Il est tout à fait possible d’envisager une telle session en salle informatique.

Etape 4 : profiter du temps d’enseignement ainsi économisé pour consacrer davantage de temps en classe aux apprentissages

Trop souvent, les exercices d’entraînement sont réalisés à la maison car ils sont particulièrement chronophages. Grâce à la PEPS, il est possible de dégager davantage de temps pour ces activités, mais aussi pour diversifier et différencier les pratiques pédagogiques. La rubrique « Outils & Didacticiels » de ce site est notamment consacrée à présenter les différentes activités mises en oeuvre dans ce cadre.

Etape 5 : préparer l’évaluation

A la fin de chaque séance, le professeur met à la disposition des élèves une quiz leur permettant de réviser les connaissances essentielles de la leçon en vue de l’évaluation.

Etape 6 : évaluer et remédier

Cette étape fait l’objet d’un article spécifique 

L’enseignant : une espèce en voie de disparition ?

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Certains collègues sont très réticents à l’idée de proposer des parties, voire la totalité de leurs cours sur le web au motif que cela constituerait un dessaisissement du pouvoir intellectuel du professeur légitimant son autorité en classe et son statut professionnel dans la société.  Pendant longtemps, j’ai été l’un de ces collègues…

Google est-il vraiment ton ami ? 

Et puis un jour, je me suis aperçu que cette croyance reposait sur une vision très éculée du métier et qu’elle était devenue complètement anachronique à une époque où les élèves peuvent désormais vérifier en quelques secondes sur leurs smartphones si la date que vient de donner le professeur est correcte.

D’où la question suivante : qu’est-ce qui retient les élèves assis pendant des heures à écouter un professeur parler d’un sujet qui n’aura probablement aucune utilité directe pour leur avenir et dont il est possible de retrouver les principaux éléments en deux clics sur le Net ?

  1. Parce que c’est comme cela que leurs parents, que leurs grand-parents, que leurs arrière grand-parents… ont appris,
  2. Parce que l’école propose une progressivité des apprentissages que les élèves ne pourraient pas mettre en oeuvre en autonomie,
  3. Parce que c’est obligatoire pour évoluer dans le système scolaire et obtenir des diplômes nécessaires dans la poursuite de leur cursus,
  4. Parce que l’école est un lieu de sociabilité d’où les élèves ne repartent pas seulement avec des connaissances, mais aussi avec des compétences sociales et une formation citoyenne,
  5. Parce que pour un certain nombre d’élèves, « apprendre » est aussi synonyme de « plaisir ».

Pour ces derniers, le travail du professeur n’est pas très compliqué. Seul ou en groupe, avec un stylo ou un clavier, avec un prof ou un livre, ils ont envie d’apprendre ! C’est pour les autres que la tâche est plus ardue et qu’il devient parfois nécessaire de justifier l’utilité de l’école.

Or, depuis quelques années, le traditionnel « A quoi ça va me servir plus tard ? » est progressivement supplanté dans le Top 10 des complaintes de l’élève par le nouveau « Pourquoi j’apprendrais toutes ces définitions alors que Google est mon ami ?« .

L’enseignant est un ingénieur pédagogique 

Face à cette évolution de l’offre culturelle, le métier d’enseignant n’a guère d’autre choix que d’évoluer face au risque de se retrouver rapidement submergé par une vague numérique. Dans un contexte de réduction budgétaire permanent, les politiques publiques ne tarderont pas en effet à proposer des formations en ligne susceptibles de remplacer plusieurs centaines de professeurs si ces derniers ne s’emparent pas eux mêmes rapidement de ces outils.

L’un des meilleurs arguments de prévention contre ce tsunami numérique est probablement apporté par Bruno Devauchelle qui a récemment proposé le concept d’ « ingénierie pédagogique » pour qualifier le travail des enseignants :

En somme, il s’agit de rappeler que le fondement du métier ne repose pas uniquement sur la transmission des connaissances, mais sur la capacité à mettre en oeuvre des stratégies d’apprentissage et une scénarisation du cours adaptées à un environnement social, à un groupe classe plus ou moins cohérent, à l’heure du cours dans l’emploi du temps, à la réactivité des élèves… C’est-à-dire à une multitude de paramètres qu’il est impossible de modéliser et systématiser par l’intermédiaire d’une machine.

Vers un accompagnement plus efficace de l’élève

L’argument défensif ne suffit pas cependant car les ressources en libre-service existent  déjà et que nos élèves ne nous ont pas attendu pour s’en emparer.

Quand j’ai commencé à enseigner en lycée, j’ai d’abord été désemparé par des élèves qui se présentaient dans ma classe avec les cours du CNED ou d’autres organismes sur le bureau. Rapidement, je me suis pourtant aperçu qu’ils n’avaient pas forcément l’intention de me piéger ou de contester mon enseignement, mais plutôt qu’ils avaient compris que le cours du CNED leur permettait d’avoir une base solide en termes de connaissances, afin de mieux profiter du temps de classe pour me poser des questions d’éclaircissement ou d’approfondissement. Or, cette stratégie s’est avérée contre-productive pour ces élèves car une partie non-négligeable du temps en classe est utilisé pour la transmission des connaissances que leurs camarades n’avaient pas forcément acquises.

Dans le cadre de la PEPS, ce temps d’enseignement ex cathedra qui constitue aujourd’hui l’essentiel du temps de classe est réduit à sa portion congrue pour dégager du temps d’apprentissage. Or, cela nécessite pour l’enseignant d’adopter une posture qui pourra paraître naturelle à certains, mais beaucoup plus difficile à concevoir pour d’autres.

  1. D’abord, il faut apprendre à se taire en classe pour laisser les élèves se concentrer sur les activités, voire se tromper en leur laissant le temps de s’auto-corriger,
  2. Ensuite, il faut accepter de ne pas apporter le même enseignement à tous les élèves, mais à intervenir auprès de groupes, voire auprès d’individus, en fonction des difficultés rencontrées.
  3. Cela signifie aussi a contrario qu’il faut apprendre à gérer une multitude de groupes en repérant ceux qui sont en difficulté, tout en ne donnant pas l’impression aux autres qu’ils sont abandonnés.
  4. Enfin, il faut réussir à mettre tout le monde au travail en évitant que des élèves ne parviennent à se reposer systématiquement sur le groupe.

Tous ces éléments sont au cœur de la PEPS et justifient le rôle essentiel de l’enseignant dans la mise en oeuvre intelligente et efficace des ressources disponibles sur le web.

Pas de révolution pédagogique sans prof 

D’ailleurs, les premiers résultats de l’utilisation des MOOCs dans le supérieur et des capsules vidéo dans le secondaire tendent à montrer qu’il était illusoire d’imaginer que ces ressources pourraient constituer à elles seules une révolution pédagogique.

La vidéo est certes plus séduisante que le livre aux yeux de certains adolescents. Elle permet parfois de réveiller la motivation des élèves… mais devient complètement inutile si l’enseignant n’est pas présent à toutes les étapes du processus d’apprentissage pour expliquer les consignes, fixer le calendrier de progression, débloquer des incompréhensions, ou bien proposer des exercices d’entraînement adaptés au niveau de chaque élève.

Comment gérer la fracture numérique ?

L’intégration d’outils numériques dans la progression pédagogique renforce-t-elle les inégalités ? La classe inversée doit-elle être réservée à des établissements privilégiés bénéficiant d’un fort taux d’équipement, ou bien d’élèves déjà équipés ? Ces questions sont importantes et méritent d’être posées car elles sont récurrentes. Néanmoins, elles témoignent à mon sens d’une inversion du problème.

La fracture numérique est une réalité aussi tangible que la fracture sociale. Ce n’est pas pour autant que l’école républicaine française a décidé d’abandonner l’éducation des  plus modestes. Au contraire, c’est une des fiertés du système scolaire français de continuer à faire fonctionner autant que faire se peut l’ascenseur social.

Non seulement la PEPS s’inscrit dans cette logique, mais elle entend également la renforcer !

Blackboard-Brooch

D’abord, il convient de relativiser les chiffres de la fracture numérique.

La dernière enquête du CREDOC sur la diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française montre certes que 17% de la population française n’a pas d’ordinateur et que 23% n’a pas accès à Internet à domicile, mais :

  • 100% des 18-24 ans disposent d’un téléphone mobile et 78% l’utilisent pour aller sur Internet,
  • 99% des adolescents disposent d’un ordinateur à la maison et 63% d’entre-eux sont même multi-équipés.

A de rares exceptions, les adolescents qui sont dans nos classes sont donc équipés et utilisent quotidiennement les technologiques de l’information et de la communication (TIC). Ce que l’on appelle la fracture numérique apparaît en fait à partir du moment où ils quittent nos salles de classe plus ou moins diplômés :

  • 96 % des diplômés du supérieur possèdent un téléphone mobile, contre 70 % seulement des non-diplômés.
  • La moitié des diplômés du Bac et du supérieur ont l’usage d’un smartphone, mais seuls 30 % des titulaires du Bepc et 16 % des non-diplômés disent en posséder un,
  • 62 % des non-diplômés disposent à la fois d’une ligne fixe et d’un téléphone mobile, contre 89 % des personnes issues de l’enseignement supérieur,
  • quasiment tous les diplômés du supérieur ont un ordinateur chez eux (97 %), contre une personne sur deux parmi les non-diplômés (51 %),
  • 52 % pour les non-diplômés ont une connexion Internet à domicile contre 95 % pour les diplômés du supérieur.

Il serait réducteur d’affirmer que seuls l’équipement et la maîtrise des TIC justifient ces différenciations entre diplômés et non-diplômés. Néanmoins, cet élément ne peut pas être non plus totalement écarté et c’est pourquoi l’usage des TIC dans l’apprentissage doit faire l’objet d’une réflexion.

Blackboard-Brooch

Comme le montrent les chiffres ci-dessus, la très grande majorité de nos élèves sont équipés pour suivre un apprentissage utilisant les TIC. Que faire cependant pour intégrer, sans discriminer, un élève qui n’aurait pas d’ordinateur de connexion à la maison ? 

  1. Faire le bilan numérique de la classe : lors de la première heure de cours, je fais remplir une fiche à mes élèves pour savoir s’il disposent d’un ordinateur personnel / familial, d’une connexion Internet, d’une imprimante et d’un smartphone connecté. Cela me permet de dresser le profil numérique de ma classe et d’évaluer les possibilités pédagogiques dans ce domaine au cours de l’année.
  2. Faire le bilan numérique de l’établissement : je présente ensuite les équipements et leurs modalités d’accès au sein de l’établissement (salles informatiques en libre accès, salles d’étude équipées d’ordinateurs, Internat, CDI, etc.). Cela me permet d’expliquer aux élèves que je n’exige pas d’eux d’être équipés, mais qu’ils ne pourront pas utiliser cet argument pour ne pas faire le travail demandé.
  3. Fixer des règles et délais de travail précis : s’il n’était jadis pas possible d’aller vérifier l’estomac du chien qui mangeait systématiquement les devoirs de Paul, il ne sera pas non plus possible de vérifier que l’ordinateur ou la connexion de Pierre est bien tombée en panne au moment de réaliser l’exercice en ligne. Or, force est de constater qu’à partir du moment où j’ai commencé à donner du travail en ligne, une mystérieuse force tellurique s’est abattue sur l’espace proche de mon établissement, faisant régulièrement bugger les ordinateurs de la région. Au bout de quelques mois, je me suis contraint à donner systématiquement une semaine de délai pour toute activité à réaliser en ligne en précisant que je n’accepterai plus aucune excuse puisqu’il est de la responsabilité des élèves d’anticiper une éventuelle faille technique pour se tourner  vers le matériel mis à la disposition dans l’établissement. Depuis, les fabricants de matériel informatique et les fournisseurs d’accès à Internet semblent avoir magiquement trouvé une solution au problème des pannées à répétition…